Le porte-parole et vice président du MEDEF revient sur l’actuel manque de main d’oeuvre dans de nombreux secteurs. Par ailleurs, il juge excessives les sanctions mises en place par le gouvernement en cas de non-respect des entreprises en matière de télétravail. Interview.
Après 2 ans de crise sanitaire, quelles sont aujourd’hui les difficultés pour les entreprises dans la mise en place du télétravail ?
Certaines entreprises ne peuvent pas ou peu recourir au distanciel, notamment les secteurs de la banque et assurance pour des questions de cyber-sécurité. Aussi, les salariés y sont parfois réticents car ils craignent l’isolement : on sait aujourd’hui que le 100 % télétravail peut provoquer des dépressions et burn-outs. Enfin, seul un tiers des postes sont télétravaillables en France : certains employeurs doivent aussi gérer des tensions sociales entre cols bleus et cols blancs au sein d’une même entreprise. Néanmoins, il faut souligner qu’au regard des milliers d’accords signés, il y a plutôt un consensus entre patrons et représentants du personnel sur ce sujet.
Les entreprises qui ne jouent pas le jeu du télétravail pourraient être pénalisées d’une amende allant de 1 000 euros par salarié concerné et ce jusqu’à 50 000 euros maximum. Que pensez-vous des sanctions mise en place par le gouvernement ?
1 000 euros, c’est le même montant que la pénalité fixée en cas d’usage d’un faux pass sanitaire. Il y a donc une question de proportionnalité et un problème ontologique, plus philosophique : la définition du poste télétravaillable est et doit rester à la main du chef d’entreprise. L’inspecteur du travail ne peut pas évaluer toutes les subtilités qui conduisent à maintenir un salarié en présentiel ou pas : comme dit précédemment, les questions de sécurité ou encore l’infrastructure informatique ne permettent pas toujours le travail à distance.
Avez-vous une vision de l’absentéisme actuel en entreprise?
Pour l’instant, avec Omicron, c’est surmontable. Heureusement, les périodes d’isolement ont été réduites, cela va permettre d’amoindrir l’impact de l’épidémie. Il y a eu plus de 10 000 vols annulés partout dans le monde pendant les vacances, les transports restent le secteur le plus sensible, ailleurs il y a des points de continuité. On espère que la vague sera passée d’ici un mois et demi, pour retrouver une situation usuelle.
Faut-il s’inquiéter de cette nouvelle vague pour les managers, qui ont géré parfois difficilement les collaborateurs à distance ?
Je pense que les entreprises ont démontré qu’elles avaient su s’adapter, même si ça a été difficile parfois, notamment pour l’intégration de nouvelles recrues : pour ces profils, le distanciel n’est pas l’idéal.
Le télétravail ne peut pas être l’alpha et l’oméga des politiques salariales. Il faut le définir dans chaque entreprise, chaque filière, chaque secteur et en fonction des territoires. Il ne faut pas non plus oublier les conditions de travail chez soi qui dépendent de la situation de chacun. Dans ce contexte, le recours grandissant aux tiers-lieux et aux espaces de co-working peut faciliter les choses. Aussi, certaines entreprises se décentralisent davantage, Doctolib a notamment prévu la création d’une vingtaine d’antennes en région. Le travail à distance permet d’ouvrir de nouveaux bassins d’emploi.
Justement, certains secteurs connaissent de grosses difficultés de recrutement. Comment expliquez-vous la pénurie de main d’oeuvre actuelle ?
La pénurie de recrutement sévit dans tous les secteurs - l’industrie ou encore le numérique - et touche toutes les tailles d’entreprises, dans tous les territoires. Il y a un million d’emplois non pourvus en France. Michelin a ouvert des centaines de postes partout dans le pays, l’entreprise n’a pas reçu un seul CV. Les causes sont diverses : le chômage a beaucoup baissé et les secteurs qui recrutent ne sont pas ceux où il y a des gens formés pour. Il y a un travail de formation et de reconversion professionnelle à engager, ainsi que sur l’orientation des jeunes. Les choses avancent, 700 000 jeunes sont aujourd’hui en apprentissage. La pénurie de main d’oeuvre s’explique aussi par des problèmes de mobilité géographique : c’est difficile de faire passer les gens d’un territoire à un autre, notamment dans les métropoles où l’immobilier est cher. C’est tout l’enjeu du programme Action Logement, qui accompagne les salariés dans leur mobilité résidentielle et professionnelle pour favoriser l'accès à l'emploi. Les problèmes de gardes d’enfants pour les femmes expliquent aussi les difficultés à recruter. Enfin, le manque de différentiel entre les revenus issus du chômage et des salaires n’incite pas pas suffisamment à la reprise d’un emploi. La réforme de l’assurance-chômage entrée en vigueur l’année dernière va permettre de créer plus de différence.
Le phénomène de grande démission qui sévit actuellement aux Etats-Unis est-il en train d’émerger en France ?
Non, ce n’est pas tout à fait le cas. Il y avait des problèmes pré-existants au covid en matière de recrutement, ils se sont aggravés avec la crise sanitaire.
Dans l’hôtellerie-restauration, après la fermeture prolongée des établissements, certaines personnes ont quitté leur emploi du fait des conditions de travail et des salaires. Il y a aujourd’hui environ 100 000 postes non-pourvus dans le secteur. C’est pourquoi des négociations de branche sont en cours afin d’augmenter les revenus de manière conséquente et attirer davantage de candidats.
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